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Page:Leconte de Lisle - Contes en prose, 1910.djvu/61

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le songe d’hermann


SIEGEL.

Hermann, Hermann ! ceux-là sont les heureux de la terre.

HERMANN.

Oh ! les pauvres heureux !

SIEGEL.

Ô mon frère ! ce langage est bien étranger à mes lèvres, mais sache-le : la contemplation constante de la beauté visible et invisible dans la nature, cette seconde ouïe de l’âme, qui prête des chants mélodieux ou sublimes aux diverses formes organiques, cette étincelle divine qui vivifie le bois et l’argile, développent dans l’âme d’immenses désirs irréalisables, des aspirations généreuses, mais vaines, vers un but à peine entrevu, un vague besoin d’irrésistible tendresse pour ce qui n’est peut-être pas ! c’est la soif de Tantale ! prends garde !

HERMANN.

Quoi ! Siegel, la beauté n’est-elle donc pas ? Ces aspirations qui m’éntraînent à elle, ce désir de justice et d’harmonie qui brûle mon coeur, cet amour de l’humanité qui souffre et se