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LE BARDE DE TEMRAH.

Et la lumière alors renaît au fond des cieux ;
Les oiseaux ranimés chantent l’aube immortelle,
Les cerfs brament aux pieds des chênes radieux ;

Le soleil est plus doux et la terre est plus belle,
Et les vieillards, auprès du bûcher consumé,
Sentent passer le Dieu d’une race nouvelle.

L’homme qu’ils redoutaient et qu’ils ont blasphémé,
Cet inconnu tranquille et vénérable aux anges,
Poursuit sa route, assis dans un char enflammé.

Il vient de loin, il sait des paroles étranges
Qui germent dans le cœur du sage et du guerrier ;
Il ouvre un ciel d’azur aux enfants dans leurs langes.

Il brave en souriant le glaive meurtrier ;
Il console et bénit, et le Dieu qu’il adore
Descend à son appel et l’écoute prier.

Ô verdoyante Érinn ! sur ton sable sonore
Un soir il aborda, venu des hautes mers,
Sa trace au sein des flots brillait comme une aurore.

On dit que sur son front la neige, dans les airs,
Arrondit tout à coup sa voûte lumineuse,
Et que ton sol fleurit sous le vent des hivers.