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Revoit-il, faisant trêve aux ardentes fatigues,
La lointaine oasis où rougissent les figues,
Et rétroite vallée où campe sa tribu,
Et la source courante où ses lèvres ont bu,
Et les brebis bêlant, et les bœufs à leurs crèches,
Et les femmes causant près des citernes fraîches ;
Ou sur le sable, en rond, les chameliers assis,
Aux lueurs de la lune écoutant les récits ?
Non ! par de là le cours des heures éphémères,
Son âme est en voyage au pays des chimères ;
Il rêve qu’Alborak, le cheval glorieux,
L’emporte en hennissant dans la hauteur des cieux ;
Il tressaille, et croit voir, par les nuits enflammées,
Les filles du Djennet à ses côtés pâmées.
De leurs cheveux plus noirs que la nuit de l’enfer
Monte un âpre parfum qui lui brûle la chair ;