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premières poésies



XLVIII


Rennes, novembre 1839.


Je commençais à m’étonner, mon Ami, que la fleur cachée sous les ronces, le rayon de soleil qui luit dans un ciel sombre, le chant mystérieux qui console des rédactions d’actes, le rêve d’un bonheur secret, aux lieux mêmes où l’on souffre, que tout cela enfin ne se formulât pas en un seul et même regret qui, au fond, n’est que celui de la souffrance ; car vous aurez beau dire, l’homme d’une nature exceptionnelle aime à être malheureux, et c’est bien facile à concevoir : des causes opposées ne peuvent nécessairement produire des effets identiques, l’âme du poète est faite d’un sentiment de douleur et d’espérance, celle de l’homme positif