Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/106

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Toi qui, crachant sur eux à la face du ciel,
Broyais leurs noms tarés sous ta foudre de fiel.

De ses derniers moments qui ne connaît l’histoire,
Quand, se frappant le front où demeurait la gloire,
Il vit, sur l’échafaud, monter tous les lauriers,
Qu’allait trancher d’un coup la faulx des meurtriers :
Et sentant son génie, à cette heure suprême,
Apparaître, se prit de regrets sur lui-même ?
Hélas ! il regrettait de s’éteindre ignoré,
De reporter à Dieu, sans avoir éclairé,
Tant de rayons, perdus pour nos cieux littéraires.
Démentons cet oracle, ô poètes mes frères,
Et relisons toujours ses vers trop tôt taris,
Qu’une saison de plus peut-être aurait mûris.
Ils ont peu de défauts, dont l’éloge s’effraie ;
Sous la riche moisson je ne vois pas l’ivraie :
Et lorsqu’après l’orage, errant dans les vallons,
De nos gazons blessés j’écarte les grêlons,
Je l’accuse de tout : et, de mes fleurs couchées,
J’en relève, en passant, qu’il n’avait pas touchées.

Comme elle eut ses Nérons, la France a son Lucain,
Qui les marquait au front d’un vers républicain.
Recueillons de ses chants l’imparfait héritage,
Et, mort assassiné, que son ombre partage