Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/113

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Sans être frère et sœur, unis, dès leur naissance,
Par la même infortune èt la même innocence,
Ils s’aimaient, sans savoir qu’on pût vivre autrement.
L’amour aveugle : eux seuls s’éclairaient, en s’aimant.
Rien de leurs cœurs mêlés ne troublait l’harmonie.
Il ressemblait à Paul, comme elle à Virginie :
C’étaient les mêmes vœux avec le même espoir :
Ils se suivaient si bien, qu’ils paraissaient se voir.
L’amour était pour eux utile et salutaire,
Comme l’air qu’on respire, et l’eau qui désaltère.
Trouvant partout en eux de fortunés séjours,
Ils ne demandaient rien, que de s’aimer toujours.
Le bonheur d’admirer n’était pour eux qu’un doute.
Quand ils marchaientensemble, ils devinaient la route.
On leur dit, une fois, qu’un fer industrieux
Peut briser les liens, qui captivent les yeux,
Et par un sens de plus compléter l’existence ;
Mais d’un art protecteur rejetant l’assistance :
« Eh ! que nous fait le jour, pour nous en informer !
» Nous ne voulons pas voir, nous voulons nous aimer.
» S’i I nous manque lejour, c’est qu’il nous esteontra i re ;
» De vivre l’un pour l’autre il pourrait nous distraire.
» Gardez donc tout entier votre univers pour vous ;
» Car Dieu, qui fit le jour, ne l’a pas fait pour nous. »

Hélas ! que nos secours font souvent d’imprudence !
De ces pauvres enfants humaine providence,