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Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/114

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Leurs inères, que tourmente un avenir confus,
Viennent à leurs genoux, pour vaincre leurs refus,
Jurer qu’en se voyant on s’aime davantage.
Plus d’obstacle ! et le fer, qu’instruit une main sage,
D’un prodige incertain essayant les hasards,
Interroge la nuit, où dorment leurs regards.
Léonie entrevoit un rayon la première ;
Mais ses yeux impuissants, et sourds à la lumière,
Rentrent dans leur sommeil, pour ne plus le quitter.
Sur l’œil de son amant le jour va s’arrêter ;
Mais il ne s’éteint point au foyer qu’il éveille :
Et ceux, dont l’existence autrefois fut pareille,
Vont, sans se séparer, suivre un autre chemin.
Ainsi naissent parfois, dans le même jardin,
Deux rosiers, que n’a point visités la culture.
La greffe se prépare à changer leur nature :
L’un renaît, embelli de bouquets éclatants ;
Mais l’autre, hélas ! en reste à ses pâles printemps :
La blessure inféconde est pour lui sans prodige,
Et sous la même écorce il sent mourir sa tige.

L’enfant, qui sur ses pieds commence à se mouvoir,
En apprend, jour à jour, l’usage et le pouvoir :
Eudoxe essaie aussi par degrés sa paupière.
L’enfance des regards doit avoir sa lisière :
Un bandeau la retient, et c’est avec lenteur,
Qu’il en voit s’éclaircir le tissu protecteur.