Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/134

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Qui des tiens eût osé, m’accusant de blasphème,
A mon cri de bataille opposer mon baptême ?
Mais ne va pas penser qu’aiguisant tes remords,
Je veuille, par faiblesse, atténuer mes torts,
Et, dans ma tombe ouverte hésitant à descendre,
Faire attendre, en poltron, le temps après ma cendre
Déjà vers l’avenir je n’étends plus de soins :
Les jours qu’on m’ôtera sont des larmes de moins.
Cet avenir, c’était quelques heures d’automne :
Tu l’avances ! c’est bien : mon printemps te pardonne
Je suis prêt. Mieux vaudrait mourir d’un javelot,
Que de s’aller coller le front sur un billot ;
Le ciel ne le veut pas : honneur à ta justice !
J’ai déjà tant souffert, que je ris du supplice ;
Car enfin qui ne sait que tu me haïssais !
Tu t’approchais de moi, quand j’avais des succès ;
Mais, méprisant bientôt mes lauriers de fortune,
Où pour vous antres ducs les aïeux font lacune,
Je n’étais plus ton fils qu’une fois par hasard.
Légitime à la guerre, et dans la paix bâtard,
Maintenant que je meurs, reconnais-toi mon père :
Et dis-le hautement, pour que je désespère.
Va, tu ne l’es que trop, et tu m’as tout donné,
Tout, ton âme, tes traits, ton sang désordonné,
Tout, jusqu’à ces fureurs, dont tu fus la victime.
Je suis né dans la honte, et je meurs dans le crime
Oui, le crime ; et ta main, qui tient le couperet,
Ne m’empêchera pas d’approuver ton arrêt.