Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/147

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Il les apprend tout bas : et ce qu’il vient d’apprendre,
Son gosier moins timide osant bientôt le rendre,
L’oiseau plus merveilleux que le téorbe humain,
Répète avec son bec ce qu’a chanté la main.

Le musicien s’étonne à tant de mélodie,
Et commence à sentir sa lyre moins hardie.
Il soulève la tête, et, d’un œil curieux,
Cherche à voir quel émule, il lui descend des cieux.
De sa voix déliée admirant la souplesse,
Il veut sur d’autres tons provoquer sa faiblesse,
Et d’un clavier si tendre effrayer les efforts.
Ce n’est plus du bonheur les rapides transports,
Qu’il module, ou des sens la langueur qui frissonne ;
La mandore farouche en tumulte résonne.
Arpège par arpège, on croit voir les soldats
Presser, ou ralentir, le bruit sourd de leurs pas,
Tandis qu’en hennissant la cavale guerrière,
De ses ongles armés bat et mord la poussière.
Le cliquetis du fer, les tambours, les clairons,
Sous leur trombe de bruits couchent les escadrons :
C’est un rhythme de rage, un concert de discorde :
On souffre, on meurt : il pleut du sang dechaque corde.
La musique dit tout ; et lorsque du combat,
Dans les lointains de l’ombre, expire le fracas,
L’instrument moins terrible, abjurant la tempête,
Par un cri de victoire en triomphe s’arrête.