Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/159

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Mais oubliant trop vite, et leur magistrature,
Et l’honneur souverain de chanter la nature,
On les vit se vautrer sous le char des tyrans,
S’énerver dans la pourpre aux pieds des conquérants,
Et, de nos passions efféminés complices,
Prostituer la lyre au commerce des vices.
Quand les reverra-t-on, législateurs nouveaux,
Au lieu de les corrompre, inspirer nos travaux !
Essayons aujourd’hui, si ce noble langage
Peut, après six mille ans de honte et d’esclavage,
Rentrer-dans sa naissance et ses premiers succès !
Tel qu’un lion blessé, qu’étranglent nos lacets,
Qui roi sous sa blessure, et roi quand il expire,
Jusqu’en son cri de mort atteste son empire,
Qu’on l’entende du moins, une dernière fois,
Pour ébranler nos fers, lever sa grande voix !

II.
Héritier favori des dogmes d’Epicure,
Lucrèce du chaos attaque l’ombre obscure,
Et, du globe encor vide explorant les déserts,
Il invente les faits, dont il peuple ses vers :
Moi, j’ose, de Newton successeur inhabile,
De l’univers moral rechercher le mobile,
Et, du monde physique examinant les lois,
Dans les jeux du cerveau trouver leur contre-poids.