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Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/269

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Ce panache aux crins noirs, que son doigt diligent
Attacha, le matin, sur un cimier d’argent.
Traversant d’un coup d’œil la fumeuse poussière,
Elle a de son époux reconnu la bannière,
Ou cru la reconnaître. « Oui, c’est bien elle ! oh ! oui,
» C’est bien là le drapeau, que j’ai brodé pour lui.
» De nos chiffres noués je vois d’ici la trace,
» Et les étoiles d’or, qui sèment sa cuirasse.
» Ah ! pourquoi mes enfants ont-ils besoin de moi !
» J’irais, mon bien-aimé, me ranger près de toi :
» Mon corps serait du tien le bouclier fidèle :
» Je garderais ta vie, en m’exposant pour elle :
» Tu donnerais la mort, moi, je l’écarterais :
» Je ne combattrais pas, je te protégerais. »

Mille cris tout à coup annoncent la victoire :
Et c’est, de son côté, que part ce bruit de gloire !
Éliza le bénit, et rend grâce, à genoux,
Au Dieu qui l’a sauvée, en sauvant son époux.
Hélas ! qui peut de Dieu sonder la providence ?
Conduite par l’amour, qui trouble la prudence,
C’est trop près du péril qu’elle invoque le Ciel ;
Même après le triomphe il est encor mortel,
Et d’un trait égaré l’atteinte meurtrière,
Avec son allégresse, interrompt sa prière.
Le plomb s’ouvre en son cœur un chemin frémissant.
Elle y porte la main, pour arrêter son sang,