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Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/352

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L’amour, pour le poète, est l’arrêt du trépas.
Vous, que j’ai peur de perdre, oh ! ne me trompez pas.
Que si jamais la gloire, à mes chants attentive,
Pour moi, dans ses moissons, garde une fleur tardive,
Je sache sur quel front, sur quel sein l’attacher !
Si son parfum vous plaît, j’irai vous la chercher.
Mais ne m’en faites pas la fleur des funérailles :
Mais ne l’envoyez pas, sous le vent des batailles,
Salir son chaste éclat de la poudre des camps,
Ou livrer sa faiblesse à l’air chaud des volcans !
Que vous rapporterait son stérile naufrage ?
Comme vos mimosas, que fane un jour d’orage,
Les lauriers du talent sont prompts à se flétrir.
Avant qu’ils aient brillé, les ferez-vous périr ?
Oh ! non : ne tentez pas leur facile agonie.
Si la rage du cœur équivaut au génie,
Ordonnez-moi plutôt d’aller m’en emparer :
Je le sens, Maria : mes vers, pour vous parer,
Réfléchiront du ciel un rayon tutélaire.
Puissé-je alors mourir du bonheur de vous plaire :
Et vous, sur mon cercueil, déposer, en pleurant,
Les palmes, que mes mai ns vous tendront, en mourant !
Aussi belle qu’Inez, comme elle idolâtrée,
Qu’au rang de son époux votre âme inaugurée
Couronne au moins mon ombre : et qu’enfin, à leur tour,
Les femmes aient un nom adopté par l’amour !