Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/372

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Si propice aux humains, si douce à la nature,
La nuit ne fait encor qu’irriter ma torture.
Il me semble dans l’air, où je cherche à te voir,
Comme un désir de plus, humer le désespoir.
Sur un lit, que tourmente une vague insomnie,
Haletant, consumé d’angoisse et d’agonie,
Je lutte, en lui cédant, contre ton souvenir :
Tout ce qui le combat sert à le retenir.
Succombé-je un moment au repos qui m’entraîne !
Au lieu de t’emporter, ce repos te ramène :
J’entends glisser sur moi ton souffle harmonieux :
Des rêves de baisers voltigent sur mes yeux :
Mes cils, qu’ils font trembler, mes cheveux, qu’ilseffleurent,
Frissonnent du plaisir, dont mes lèvres se leurrent :
Un délire d’extase irrite mon sommeil,
Et mon sang embrasé, qui s’élance au réveil,
Mon sang, de toutes parts, affranchi de ses chaînes,
Semble, en ruisseau delave, échapper de mes veines.

Qui donc les brisera, ces liens vénéneux,
Qui tordent mon sommeil et mes jours dans leurs nœuds,
Invisibles serpents qui, repoussés sans cesse,
Resserrent leurs anneaux autour de ma détresse ?
Que le ciel me délivre et la jette en mes bras,
Cette femme ! ou je crois que Dieu n’existe pas.