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Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/383

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Et cette voix, qui tremble a travers la bruyère,
Ta mère, Maria, qui répond à ma mère.

Aveugle, qui te plais à douter de ma foi,
Entends ce que ta mère en mon cœur dit de toi.
Elle te dit qu’au ciel, où tu crois qu’on nous blâme,
On n’a pas tant d’amour, qu’elle en voit dans mon âme.
Ne me condamne pas à ne te rien donner,
Et reçois le bonheur, toi qui peux l’ordonner.
Peut-être as-tu raison d’en craindre les épines :
Mais tu ne les vois pas, hélas ! tu les devines.
Et quand il serait vrai qu’en ce monde imposteur,
Son éclat, quel qu’il soit, n’est qu’un éclat monteur,
De tes réalités la vanité frivole
Vaut-elle mieux, dis-moi, qu’une erreur qui console ?
Erreur souple et facile, elle épure nos jours,
Répond à nos dédains, en revenant toujours,
Et sans changer ses traits, variant la constance,
Sait, pour la faire aimer, déguiser l’existence.
Peut-être ces tableaux qui courent dans mes vers,
Ce jour étincelant, dont je peins l’univers,
Et ces mille bouquets, ces folles broderies,
Dont l’aiguille d’avril parfume les prairies,
Et ces yeux étoilés, qui veillent sur nos maux,
Et ces voix, dont mon âme invente les échos,
Tout peut-être m’abuse et vient de ta présence :
Et, déplorant du sort l’avare bienfaisance…