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Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/427

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Une voix, toujours prête à fronder tes aveux,
Persifle mes désirs, ou contredit mes vœux.
Je voudrais de mon ciel t’épargner les menaces,
Sans t’infliger ma vie, accompagner tes traces,
Respirer pour te voir, vivre de t’écouter,
Et je m’entends déjà marcher, pour te quitter.
Prophète des chagrins, dont j’attends la sentence,
J’envisage de près ma future existence :
Et le vent du départ commence à déplier
La voile du vaisseau, qui doit m’expatrier.
Vous pleurerez peut-être un instant mon absence,
Maria : puis le monde, étalant sa puissance,
Vous y retournerez : vos yeux m’y chercheront :
Puis, ne m’y voyant pas, vos regards m’oubliront :
Puis, d’un reste de pleurs débarrassant vos charmes,
Je serai, comme un mort, effacé de vos larmes :
Car, hélas ! que nos ans soient ou non révolus,
Qu’est-ce qu’un exilé, dont on ne parle plus ?
C’est un mort sans sommeil, une cendre animée,
Et dont la tombe est verte, avant d’être fermée.

Oh ! ne me donnez pas cette injure à prévoir :
Quels que soient les foyers où je doive m’asseoir,
A votre feu du moins laissez ma place vide.
Que mon dernier fuseau lentement se dévide :
Et que ce lieu, témoin de mes vœux éplorés,
Vous parle encor de moi, quand vous le reverrez !