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Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/428

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Toi, qui seras heureuse, écoute eneor cette onde,
Quand elle roulera mon nom passé du monde :
Prête encore les yeux à ces astres si doux,
Qui m’ont vu tant de fois le front sur tes genoux,
Et dont les feux tremblants, si tu lis leurs présages,
De ma pensée encor teindront ces paysages.
Je te laisse, en partant, ces lieux pour souvenir,
Et ce6 astres, ces eaux, ces vers, pour te bénir.
Que ces vers, suspendus aux arbres de tes rives,
Gémissent quelquefois dans les feuilles plaintives,
Comme un soupir d’amour, qui te viendra des cieux :
Ou, si des chants sacrés les mots consolent mieux,
Comme ces luths, bannis sur une terre ingrate,
Que le vent balançait aux saules de l’Euphrate,
Et qui, pleurant aussi loin de leur nation,
Murmuraient : Israël, souviens-toi de Sion !

Pourquoi tourner la tête, et paraître affligée ?
Ton espérance, à toi, n’est pas découragée :
L’horizon de ta vie, encor rose et vermeil,
N’est pas, comme le mien, delaissé du soleil.
Moi, je suis né proscrit, tout me devient supplice :
Ma lèvre, en l’effleurant, change l’eau du calice :
Un nuage à demeure est fixé sur mon front,
Et, plus morne que lui, ma pensée y répond.
Pourquoi voudrais-je encor rembrunir ta carrière,
Et, comme l’albatros, dont l’aile meurtrière,