Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/450

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OMBRA ADORATA

Ne parlez pas des vers ! leurs flèches cadencées
Vont, au bord de notre âme, expirer émoussées :
Elles piquent l’écorce, et le sang n’en sort pas.
Seule de tous les arts, la musique, ici-bas,
Sait ranimer du cœur la voix long-temps muette,
Embellir le présent du passé qu’il répète :
Et, nous cachant les maux qui pourraient le ternir,
Comme un rêve sonore évoquer l’avenir.
Tous ces vers, qu’à l’esprit on jette lettre à lettre,
Le limon de la terre avec eux y pénètre ;
La musique, plus pure, est une voix du ciel,
Qui rend, lorsqu’il l’entend, l’homme immatériel.
On dirait qu’échappé des astres d’Ausonie,
Un ange étend sur nous ses réseaux d’harmonie,
Ou, caressant nos fronts de ses ailes d’encens,
Comme un parfum subtil se glisse dans nos sens.
Langue des séraphins, que parlait Cimarose,
Toi seule nous instruis de notre apothéose !