Aller au contenu

Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/535

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Où, d’un soleil commun partageant la chaleur,
Une fledwige, avec moi, respirait du malheur.
La base existe encor : mais ce séjour magique,
Qui naissait sous ma lyre, hélas ! peu prophétique,
Plus vite que ses chants il s’est évaporé ;
Le souffle de l’absence a tout défiguré.
Excepté moi, qui pleure aujourd’hui mes chimères,
Qui peut se rappeler ces songes éphémères ?

Si jamais, lui disais-je en mon jaloux effroi,
Tu relis, Maria, cette scène sans moi,
Réveille, par pitié, l’heure alors assoupie,
Où mon crayon pensif t’en faisait la copie.
Du soir de Lauterbrûnn, que je n’oublirai pas,
Rappelle-toi l’orage oublié dans mes bras :
Et, si ces nobles vers, dont ta jeune paresse
Ne veut pas bégayer l’indigène richesse…
Hélas ! la scène existe, elle est là, sous mes yeux,
Le témoin d’un bonheur remonté dans les cieux :
Le monde, où je la lis, craque encor sous la foudre,
Dont la meule de feu semble vouloir le moudre ;
Mais ce n’est que pour moi que la foudre et les vers
Ont les mêmes accents, et les mêmes éclairs.
Les mêmes ! non : flétri par le vent du parjure,
Mon cœur décomposé change à chaque blessure.
L’amour, comme un remords, m’a dégradé le sein.
Je reconnais mes traits dans ceux de l’assassin,