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Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/556

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C’est par hébétement que je n’ose guérir,
Et que, las d’exister, je résiste à mourir.
Où donc chercher asile ? où trouver une pierre,
Pour asseoir son malheur, si l’on fuit la dernière ?
Et de quel droit se plaindre et gémir d’un affront,
Quand on porte un calus au cœur et sur le front :
Quand, trop dégénéré pour vivre de rancune,
Celle dont on la tient fait aimer l’infortune ?
Qu’une âme de poète est un présent fatal !
Une fois qu’il s’est pris dans les réseaux du mal,
Il ne peut respirer, sans en serrer les mailles.
De son génie éteint les ardentes semailles,
Au lieu de se produire en épis lumineux,
Dressent, autour de lui, leurs germes vénéneux.
De ceux qu’il devait peindre, il grossit ses orages :
Il couve, dans son sein, toute une hydre d’images
Et le moindre tourment, le plus léger ennui,
Il s’en fait une armée en marche contre lui.