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Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/563

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Àu milieu des parfums, dont j’étais entouré,
C’est là, que j’achevais quelque ouvrage inspiré,
Et que souvent de loin, à travers mes charmilles,
Patriarche en espoir, j’ai vu mes deux familles,
Celle par qui l’on vit, celle qui vit par nous,
Autour de mon bonheur se donner rendez-vous.

Qu’il était beau ce rêve, aujourd’hui si pénible !
A force d’en parler, je l’avais cru possible :
Maisrien n’est stableau monde, hélas ! quelesdouleurs.
Le vaisseau, qui portait ma cargaison de fleurs,
A moitié de sa course a trouvé le naufrage.
Mon paradis d’espoir a sombré dans l’orage,
Plus vite qu’en automne on ne voit, dans les bois,
Les feuilles et les nids s’envoler à la fois :
Plus vite qu’on ne voit, quand la brume est venue,
Le canot du croissant se noyer dans la nue :
Ou d’un soleil d’hiver le rayon matinal
Submerger ces bouquets de tulle et de cristal,
Que le givre nocturne a brodés sur nos vitres.
Que nos plus beaux romans ont de tristes chapitres :
Et qu’elle est frêle, ô Dieu, cette félicité,
Dont nous entoure un songe inexpérimenté !
Plus durable peut-être est l’ardent météore,
Qui sur la brise errante, en jouant, s’évapore :
Ou ce trésor vermeil, dont l’enfant du hameau
Gonfle et suspend la nacre au bout d’un chalumeau.