J’aime à tâter des yeux le pouls de tes marées.
D’éloquentes leçons tes ondes chamarrées,
Comme un autre océan balancent, sous mon front,
Les flots de ma pensée, inquiète et sans fond :
Et je sens mon esprit, que leur désordre allume,
Traduire, en les sondant, tes énigmes d’écume.
Pour te rire de l’homme et l’instruire, dis-moi,
Ciel fiévreux de la mer, quel Dieu réside en toi ?
L’homme a beau, dans son vol, te fouler en monarque,
Sur tes sentiers mouvants jamais son vol ne marque.
L’homme, roi de la terre où son trône est jeté,
Y fait, même en tombant, preuve de royauté ;
Que reste-t-il du sceptre et du mors qu’il t’impose ?
Quand le regard penseur sur ton-sein se repose,
Que ce monde si large est tout à coup petit !
L’histoire, comme un fleuve, y roule et s’engloutit.
Des peuples et des rois tu vois passer la lutte,
Et tu ne retiens pas la date de leur chute :
Indifférente à tout, lavant, des mêmes flots,
Les murs armés de Rhode, ou les fleurs de Délos ;
Et l’homme, qui comprend tes oracles sublimes,
Va pourtant, de sa rage insultant tes abîmes,
Mêler le bruit mesquin de ses emportements
Au fracas solennel de tes grands mouvements !
L’homme en vain par orgueil s’obstine à ne pas lire
Les immuables lois de ce changeant empire,
Et croit, en affectant un air d’éternité,
Semer de toutes parts pour l’immortalité :
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