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Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/65

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Quand ceux que nousaimions dorment tous dans leur tombe :
Quand notre espoir, comme eux, dans sa fosse est couché
Tout entier, sans que l’œil, sur sa pierre penché,
Voie un peu de gazon verdoyer dans ses fentes ;
Le monde alors, son bruit, ses vapeurs étouffantes,
Rien de lui ne va plus à nos sens moribonds.
Mais toi, qui ne meurs pas, ô ciel, tu nous réponds !

XXX.
S’il n’est rien d’aussi grand, que de voir l’homme sage,
Sans reculer d’un pas, lutter avec l’orage,
Et même, en lui cédant, plus fort que le chagrin,
Au-dessus du malheur lever un front serein :
Rien ne serait plus beau, chassé de poste en poste,
Que de voir l’homme juste, intrépide holocauste,
Par le vent du destin poussé dans le saint lieu,
Achevant son combat sous le regard de Dieu.
Oh ! faites-moi du cloître un temple de refuge,
Où l’on entre en vaincu, mais non pas en transfuge !
Comme vos vieux soldats par la guerre amputés,
Les mutilés du sort y seront respectés.
Mais ces couvents du jour, où l’obscure paresse,
Pour quitter le harnais, n’attend pas la vieillesse :
Qu’habitent l’ignorance et l’incapacité :
Où du culte de Dieu la sainte austérité
Se change en habitude, en frivole pratique,