Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/64

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Dire qu’on a vécu, c’est refaire ses songes ;
Mais les recommencer, c’est encor en gémir !
De cette vie injuste abrités pour dormir,
Ils retrouvent la voix, pour avoir pitié d’elle.
Puis au chœur, tout à coup, la cloche les rappelle ;
Ils y retournent tous, comme un obscur bétail,
Que le repos fatigue autant que le travail,
Demander une tombe, où l’on pourra se taire.
Après l’avoir quittée, on maudit donc la terre !
Que ce couvent alors, un moment respecté,
Apparaît pauvre et nul au regard attristé !
On ne l’aperçoit plus que dans l’ombre du blâme.
Si ces sortes d’asile étaient, aux maux de l’âme,
Ouverts, comme un hospice à notre infirmité :
Si, sorti du creuset de la calamité,
Il fallait, pour entrer, montrer ses cicatrices :
Dieu, que j’approuverais ces sacrés édifices !
Quand le sort a frappé de toute sa vigueur ;
Quand l’esprit saigne en nous des blessures du cœur,
Et s’use à mesurer le dard qui nous pénètre :
C’est alors seulement qu’on pourrait nous permettre
De nous réfugier aux pieds de l’Éternel,
Et de mourir tranquille à l’abri d’un autel.
Quand de la mort de l’âme on sent son corps qui tombe :