Page:Lefèvre-Deumier - Poésies, 1844.djvu/77

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LES HEURES DU POÈTE.


Chacun sait que la vie est amère et méchante :
Mais qui la connaît mieux que celui qui la chante !
Abeille infatigable en ses doctes moissons,
Il déchire son aile aux dards de nos buissons,
Et ne goûte jamais au miel de ses paroles.
Voyez-vous du printemps les jeunes banderoles,
Pavoisant de ses vers les détours cadencés,
Embaumer vosboudoirs, quand vos champssontglacés ?
Ce n’est qu’à sesdouleurs que vous devez leurs charmes :
Ces bouquets d’harmonie ont fleuri sous ses larmes.
Vous vous imaginez que ses jours sont contents :
Et c’est à ses chagrins qu’il mesure le temps !
Ils renaissent pour lui des vers qui les consolent,
Et grandissent toujours, quand les vôtres s’envolent.
Quelque horloge qu’il prenne, il ne peut s’oublier :
La cendre de son cœur remplit son sablier :
Et ses pleurs, inconnus à nos molles demeures,
Dans sa elepsydreen deuil l’ont seuls marcher lesheures.

SIoiiK’nkmitz, l827.