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Arrivés à l’Arc-de-Triomphe, au bruit de la fusillade et des obus dont quelques-uns vinrent éclater autour d’eux, ils descendirent l’avenue Dauphine jusqu’aux fortifications, sur lesquelles, rompant leurs rangs que l’explosion des obus n’avait pu leur faire quitter, ils se répandirent pour y planter les bannières de leurs loges respectives, sous le feu continuel des assaillants. Ces bannières restèrent à leur place jusqu’à l’entrée des troupes dans Paris.

Sur tout le parcours de son long trajet, la colonne maçonnique avait rencontré une foule respectueuse et émue, comprenant la haute portée morale de l’acte qui s’accomplissait. — Il fallait donc après tout, disait-on, que cette Commune fût quelque chose de grand et de sérieux[1] pour que la Franc-Maçonnerie, cette association dans laquelle se trouvent confondus des gens de toutes classes, de toutes conditions et surtout de toutes religions politiques et morales, et qui, depuis si longtemps, se tenait renfermée dans ses temples, se fût décidée à en sortir pour venir adhérer à la Commune et allât jusqu’à offrir son sang s’il le fallait pour le triomphe de sa cause.

Dans cette grandiose manifestation, on remarquait des vieillards courbés par l’âge, marchant aussi résolument au-devant d’une mort possible que s’il se fût agi de se rendre à quelque fraternelle agape. Il nous souviendra longtemps du F.·. Beslay qui, malgré ses 77 ans, avait voulu porter le magnifique mais un peu lourd drapeau rouge, dont la Commune avait fait présent ce jour-là aux Francs-maçons. On eut grand peine à obtenir de lui qu’il se fit relayer par un autre F.·., moins âgé que lui.

Spectacle vraiment digne et touchant à la fois, et que des hommes vraiment honnêtes peuvent seuls comprendre !

À force de démarches, les FF.·. qui avaient provoqué cette démonstration maçonnique obtinrent enfin

  1. Il va sans dire que nous n’entendons parler ici que de l’institution eu elle-même et non de la composition de ses membres.