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du jour, ne contribuait pas peu à entretenir ces agitations dont on fit un crime aux réunions populaires[1].

Malgré tout ce qu’on en peut dire, outre que le droit de réunion devrait être placé au-dessus de toute réglementation gouvernementale, nous osons affirmer que la plupart de ceux qui prirent la parole dans ces réunions, presque tous ouvriers appartenant à l’Internationale, le firent avec convenance, avec tact, souvent avec assez de talent, et témoignèrent d’une connaissance réelle des questions qu’ils traitaient.

L’avénement du peuple travailleur à la vie politique était désormais un fait acquis et cela de par le socialisme même.

Aussi de quels sarcasmes, de quelles railleries, de quelles calomnies même ne furent pas l’objet les réunions publiques et ceux qui les fréquentaient !

Députés conservateurs et députés de l’opposition ; bourgeois royalistes, libéraux et républicains, tous s’accordèrent à dépeindre les réunions publiques comme d’affreux repaires, dans lesquels les honnêtes gens qui s’y aventuraient couraient, chaque soir, le risque d’être égorgés, et ceux y prenaient la parole comme des bandits prêchant le massacre et le vol, ou au moins comme des gens suspects payés par la police[2].

Il va sans dire que toutes ces accusations étaient lancées par des gens qui n’avaient jamais mis les pieds

  1. Il nous souvient entr’autres qu’un soir, à la Redoute, président d’une réunion où la vie et les ouvrages de Proudhon devaient être examinés, nous dûmes résister aux injonctions du commissaire de police qui avait prétendu dissoudre la réunion parce que l’orateur annonçait qu’il allait examiner l’étude économique de Proudhon sur la nécessité de l’observation du dimanche. Le malheureux magistrat avait cru qu’il s’agissait de dogmes religieux dont l’examen était interdit par la loi. — Le parquet, plus intelligent, n’exerça d’ailleurs aucune poursuite au sujet de notre refus d’obéissance à l’injonction du commissaire.
  2. On se rappelle que cette dernière accusation fut lancée par l’honnête Garnier-Pagès à la tribune du Corps législatif, ce qui n’empêcha pas ce vertueux citoyen de mendier les suffrages des travailleurs dans ces mêmes réunions publiques, quelques mois après.