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Page:Legouvé - Dernier travail, derniers souvenirs, 1898.djvu/180

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les plus pathétiques et les plus puissantes qu’ait jamais créées le génie. Le second acte de Zaïre me semble égal au second acte d’Horace.

Les trois derniers actes, moins beaux peut-être que le second, ont un charme d’imagination, un romanesque, une grâce abandonnée, qui font de Voltaire le précurseur du théâtre moderne. Même succession de coups de théâtre qu’aujourd’hui. Même habileté de préparation. Même théorie de frapper fort, plutôt que de frapper juste. Mêmes artifices. Zaïre est une tragédie construite comme un drame, voire, si vous voulez, comme un mélodrame. La Croix de ma mère date de Zaïre. La lettre qui fait le dénouement, la lettre au double sens mystérieux a été bien souvent rééditée par nos dramaturges ; enfin, dernière remarque singulière, Voltaire débute dans la gloire par une pièce d’amour, comme Corneille dans le Cid, comme Racine dans Andromaque, comme Victor Hugo dans Hernani. Ne voyons-nous pas là la preuve évidente que le signe caractéristique, original, du génie dramatique français, ce qui le distingue de la tragédie grecque dont il est sorti, c’est la peinture de la passion ?

Après Zaïre, Alzire, 1737. Alzire a le même mérite d’intérêt romanesque que Zaïre, mais à