Page:Legouvé - Soixante ans de souvenirs, 1886.djvu/357

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quelque peu chevaleresque le préparait, comme ses goûts, à ce second personnage où nous allons le suivre, l’aristocrate.

— Pour arriver de là au démocrate ?

— Oui.

— Au démocrate convaincu, converti ?

— Oui.

— Je voudrais bien savoir par quel chemin ?

— Par un chemin fort étrange. Savez-vous qui l’a transformé ? Sa plume. En général c’est l’auteur qui fait son ouvrage ; ici c’est l’ouvrage qui a fait l’auteur. Mais n’anticipons pas ; nous avons encore deux étapes à parcourir avant d’arriver à ce but final, et il faut d’abord que je vous introduise dans le monde nouveau où va se mouvoir la figure d’Eugène Sue.


II

Sous la monarchie de Juillet, les salons ont exercé sur la littérature une influence assez considérable ; j’en citerai deux que j’ai connus : le salon de Mme Récamier et celui de la duchesse de Rauzan, la digne fille de la célèbre duchesse de Duras auteur, d’Ourika et d’Édouard.

Ces deux salons étaient à la fois semblables et différents : semblables, car on y rencontrait un même mélange de grands noms aristocratiques et de grands