Page:Leibniz - Nouveaux Essais sur l’entendement humain, 1921.djvu/252

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

démonstration exacte qui prouve que les objets de nos sens, et des idées simples que les sens nous présentent, sont hors de nous. Ce qui a surtout lieu à l’égard de ceux qui croient avec les cartésiens et avec notre célèbre auteur, que nos idées simples des qualités sensibles n’ont point de ressemblance avec ce qui est hors de nous dans les objets : il n’y aurait donc rien qui oblige ces idées d’être fondées dans quelque existence réelle.

§ 4, 5, 6, 7. Philalèthe. Vous m’accorderez au moins cette autre différence entre les idées simples et les composées que les noms des idées simples ne peuvent être définis, au lieu que ceux des idées composées le peuvent être. Car les définitions doivent contenir plus d’un terme, dont chacun signifie une idée. Ainsi l’on voit ce qui peut ou ne peut pas être défini, et pourquoi les définitions ne peuvent aller à l’infini ; ce que jusqu’ici personne, que je sache, n’a remarqué. Théophile. J’ai aussi remarqué dans le petit Essai sur les idées 16’, inséré dans les Actes de Leipzig il y a environ vingt ans, que les termes simples ne sauraient avoir de définition nominale : mais j’y ai ajouté en même temps que ces termes, lorsqu’ils ne sont simples qu’à notre égard (parce que nous n’avons pas le moyen d’en faire l’analyse pour venir aux perceptions élémentaires dont ils sont composés), comme chaud, froid, jaune, vert, peuvent recevoir une définition réelle, qui en expliquerait la cause : c’est ainsi que la définition réelle du vert est d’être composé de bleu et de jaune bien mêlés, quoique le vert ne soit pas plus susceptible de définition nominale qui le fasse reconnaître que le bleu et le jaune. Au lieu que les termes, qui sont simples en eux-mêmes, c’est-à-dire dont la conception est claire et distincte, ne sauraient recevoir aucune définition, soit nominale, soit réelle. Vous trouverez dans ce petit Essai, mis dans les Actes de Leipzig, les fondements d’une bonne partie de la doctrine qui regarde l’entendement expliquée en abrégé.

§ 7, 8. Philalèthe. Il était bon d’explique ce point et de marquer ce qui pourrait être défini ou non. Et je suis tenté de croire qu’il s’élève souvent de grandes disputes et qu’il s’introduit bien du galimatias dans le discours des hommes pour ne pas songer à cela.

Ces célèbres vétilles, dont on fait tant de bruit dans les écoles, sont venues de ce qu’on n’a pas pris garde à cette différence qui se trouve dans les idées. Les plus grands maîtres dans l’art ont été contraints de laisser la plus grande partie des idées simples sans les définir, et quand ils ont entrepris de le faire, ils n’y ont point réussi. Le