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Page:Lemaître - Chateaubriand, 1912.djvu/184

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Elle était très peu bourbonienne et grande admiratrice de Bonaparte. Elle avait beaucoup d’esprit, beaucoup de clairvoyance, et le don de l’ironie. La cohabitation avec sa femme dut être, pour Chateaubriand, hérissée de continuelles aiguilles. Elle n’avait qu’à être elle-même pour l’exaspérer ; et d’avance il lui ôtait tout remords.

Nommé par Bonaparte ministre dans le Valais, il vint d’abord à Paris, et c’est là que sa femme vint le rejoindre. Le 21 mars 1804, raconte-t-il, se promenant dans Paris, il entendit crier la nouvelle officielle du « jugement de la commission militaire spéciale convoquée à Vincennes » qui condamnait à la peine de mort le duc d’Enghien. Rentré chez lui, il « s’assit devant une table et se mit à écrire sa démission de ministre du Valais ». C’était fort bien, et ce n’était pas sans danger. Je n’ai jamais dit qu’il n’eût point l’âme haute ou manquât de courage.

(Il faut dire que, d’après M. Albert Cassagne, qui apporte ses preuves, Chateaubriand ne tenait pas du tout à aller s’enterrer à Sion, qu’il appelle « un trou horrible ». L’exécution du duc d’Enghien lui aurait simplement fourni une occasion de démissionner avec éclat. Mais, quand nous savons qu’une action a eu de beaux mobiles, n’allons pas plus loin et gardons-nous d’y chercher encore d’autres mobiles moins reluisants, car on les trouve toujours.)

Si Bonaparte n’eût pas tué le duc d’Enghien, qu’