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Page:Lemaître - Chateaubriand, 1912.djvu/343

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hardie, autant ses vers sont timides et pâles. Et quand il veut y mettre de la couleur, je crois que c’est pire :

 Pour appui du dattier empruntant un rameau,
 Le jour j’aurais guidé ton paisible chameau.

On sent qu’il est à la gêne. C’est Jéhovah, Moïse et Aaron, qui devaient avoir le beau rôle et dire les choses les plus belles ; et il ne les a pas trouvées. Dans le fond, le trouble et la passion de Nadab, l’impureté et la perfidie d’Arzane, et le culte voluptueux d’Adonis font bien mieux son affaire. Son imagination est donc avec Amalec et l’idolâtrie. Or, cela ne lui sert de rien. Nadab essaye bien de rappeler les fureurs du René des Natchez :

 Laisse-moi m’enchanter d’innocence et de crime,
 Connaître mes devoirs sans te manquer de foi,
 Apercevoir l’abîme et m’y jeter pour toi !

Et encore :

 Ma souffrance est ma joie, et je veux à jamais
 Conserver la douceur du mal que tu me fais.

Mais que le « Chant de la Courtisane » est peu enivrant !

     Viens que je sois ta bien-aimée,
 J’ai suspendu ma couche en souvenir de toi ;
     D’aloës je l’ai parfumée ;
 Sur un riche tapis je recevrai mon roi ;
 Dans l’albâtre éclatant la lampe est allumée ;
 Un bain voluptueux est préparé pour moi.

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