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Page:Lemaître - Chateaubriand, 1912.djvu/63

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à cause de l’immoralité et de l’égoïsme des individus et à cause des « folies et des imbécillités » de l’ancien régime, dont il fait le plus sombre des tableaux. Mais la Révolution a été abominable à son tour. Vouloir établir la démocratie chez un peuple corrompu, cela est fou. Lui aussi a cru à la démocratie ; peut-être que ses opinions actuelles (le royalisme) ne sont que « le triomphe de sa raison sur son penchant ». — « En ce qui le regarde comme individu », toutes les constitutions lui sont parfaitement indifférentes :

 Nous nous agitons aujourd’hui pour un vain système, et nous ne
 serons plus demain ! Des soixante années que le ciel peut-être
 nous destine à traîner sur ce globe, nous en dépenserons vingt
 à naître et vingt à mourir, et la moitié des vingt autres
 s’évanouira dans le sommeil. Craignons-nous que les misères
 inhérentes à notre nature d’homme ne remplissent pas assez ce
 court espace sans y ajouter des maux d’opinion ?

Et plus loin : « La liberté politique n’est qu’un songe, un sentiment factice que nous n’avons point… Tant que nous ne retournerons pas à la vie du sauvage, nous dépendrons toujours d’un homme. Et qu’importe alors que nous soyons dévorés par une cour, par un directoire, par une assemblée du peuple ?… Tout gouvernement est un mal, tout gouvernement est un joug. » Toutefois, il vaut mieux obéir à un roi qu’à une multitude ignorante.

Tel est, vers 1795, le royalisme de Chateaubriand. Et