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Page:Lemaître - Corneille et la Poétique d’Aristote, 1888.djvu/86

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n’y soit comme enchevêtrée, convention ! Celui qui croit les réduire ne fait que les changer. Les prétendues règles de l’unité de jour et de l’unité de lieu avaient pour but, d’après Corneille lui-même, de sup primer certaines conventions, qu’on acceptait pourtant sans peine ; et voilà que, pour observer ces règles, il invente lui-même d’autres conventions, beaucoup moins simples et plus difficiles à accepter !

L’unité de jour et de lieu n’est, je crois, dans aucune des comédies d’Augier. Elle est, il est vrai, dans la Princesse Georges, dans Monsieur Alphonse et dans Francillon : mais, si ces comédies sont excellentes, elles ne sont peut-être pas supérieures au Demi-Monde, au Père prodigue, à l’Ami des femmes, et à d’autres où manque cette unité. Ce n’est point parce qu’elle s’y trouve que l’action de Monsieur Alphonse ou de Francillon est particulièrement rapide et ramassée : mais c’est parce que l’action y est ramassée et rapide qu’elle s’y trouve. Maintenant, je ne ferai aucune difficulté de reconnaître que, si Corneille, Racine et Molière avaient tort de prendre cette double unité pour une règle, cependant le soin qu’ils prenaient de l’observer (ou de la respecter tout en la tournant) leur a fait rencontrer plus souvent, au théâtre, une simplicité, une rapidité et, si je puis dire, une plénitude d’action, qui étaient d’ailleurs dans leurs goûts.

Corneille commence toujours par des subtilités, parce qu’il est Normand, et finit par des aveux, parce qu’il est honnête homme. En voici d’un grand prix :