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Page:Lemaître - Jean-Jacques Rousseau, 1905.djvu/229

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Et là-dessus on peut également dire, selon qu’on lui est ennemi ou indulgent, que c’est grande impudence à lui d’écrire un traité de l’éducation après avoir abandonné ses cinq enfants, — ou qu’il l’écrit dans une pensée d’expiation.

Commençons. — L’objet de l’éducation est de former non un citoyen, ni l’homme de telle ou telle profession, — mais un homme. (Je ne sais pas s’il ne serait pas plus simple et plus sûr de former d’abord l’homme d’un pays, d’une religion, d’une profession, et si « l’homme » tout court ne viendrait pas par surcroît : mais passons.)

Dans l’ordre naturel, dit Rousseau, les hommes étant tous égaux, leur vocation commune est l’état d’homme ; et quiconque est bien élevé pour celui-là ne peut mal remplir ceux qui s’y rapportent… Vivre est le métier que je veux apprendre à mon élève. En sortant de mes mains, il ne sera, j’en conviens, ni magistrat, ni soldat, ni prêtre ; il sera premièrement homme : tout ce qu’un homme doit être, il saura l’être au besoin aussi bien que qui que ce soit ; et la fortune aura beau le faire changer de place, il sera toujours à la sienne… Celui d’entre nous qui sait le mieux supporter les biens et les maux de cette vie est à mon gré le mieux élevé, d’où il suit que la véritable éducation consiste moins en préceptes qu’en exercices.

Mais cet objet de l’éducation, comment le réaliser ?

Dans l’article : Économie politique écrit pour l’Encyclopédie (en 1745, je crois), Rousseau pensait que l’objet de l’éducation est de former des