Page:Lemaître - Jean Racine, 1908.djvu/115

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l’un des plus beaux épisodes de son histoire : son entrée dans l’Inde et sa rencontre avec Porus. Cet épisode est raconté dans le VIIIe livre de Quinte-Curce.

Ce VIIIe livre est très brillant. Il contient notamment deux morceaux fort remarquables : l’éloquente et ingénieuse apologie d’Alexandre par lui-même, en réponse au réquisitoire du jeune conspirateur Hermolaüs, — et le récit du passage de l’Hydaspe et de la bataille.

Les propos que le rhéteur prête à Alexandre ont de la grandeur et ne sont pas sans vraisemblance. J’en citerai un passage intéressant :

Hermolaüs me reproche que les Perses sont auprès de moi en grand honneur. C’est sans contredit la preuve la plus frappante de ma modération que de commander sans orgueil aux vaincus. Je suis venu en Asie, non pour bouleverser les nations, ni pour faire un désert de la moitié de l’univers, mais pour apprendre aux peuples même que j’aurai conquis à ne pas maudire ma victoire. Aussi vous voyez combattre pour vous et répandre leur sang pour votre empire ces mêmes hommes qui, traités avec hauteur, se fussent révoltés. La conquête où l’on n’entre que par le glaive n’est pas de longue durée ; la reconnaissance des bienfaits est immortelle. Si vous voulez posséder l’Asie, non la traverser, il faut admettre les peuples au partage de notre clémence ; leur attachement rendra notre empire stable et éternel.

Mais je suis coupable de faire adopter aux Macédoniens les mœurs des vaincus ? — C’est que je vois chez plusieurs nations beaucoup de choses qu’il n’y a pour vous nulle honte à imiter. Un si grand