Page:Lemaître - Jean Racine, 1908.djvu/134

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coterie, et conte la jolie histoire de la mère Angélique et des deux capucins à qui cette supérieure zélée sert du pain des valets et du cidre quand elle les croit amis des jésuites, et du pain blanc et du vin des messieurs quand on lui a dit que ces deux moines sont bons jansénistes. Et il ne craint pas de parler fort légèrement de M. Antoine Lemaître, de ce M. Lemaître qui l’avait appelé autrefois « son cher fils » .

Deux amis de Port-Royal, Du Bois et Barbier d’Aucour, répondirent à Racine. Du Bois est judicieux, mais lourd ; Barbier d’Aucour est ennuyeux et veut trop faire le plaisant. Racine leur répliqua dans une seconde lettre, aussi spirituelle et, je crois, encore plus brillante et vive que la première. J’en lirai un petit passage pour votre plaisir :

… Je n’ai point prétendu égaler Desmarets à M. Lemaître. Je reconnais de bonne foi que les plaidoyers de ce dernier sont, sans comparaison, plus dévots que les romans du premier. Je crois bien que, si Desmarets avait revu ses romans depuis sa conversion, comme on dit que M. Lemaître a revu ses plaidoyers, il y aurait peut-être mis de la spiritualité ; mais il a cru qu’un pénitent devait oublier tout ce qu’il a fait pour le monde. Quel pénitent, dites-vous, qui fait des livres de lui-même, au lieu que M. Lemaître n’a jamais osé faire que des traductions ! Mais, messieurs, il n’est pas que M. Lemaître n’ait fait des préfaces, et vos préfaces sont fort souvent de gros livres. Il faut bien se hasarder quelquefois : si les saints n’avaient fait que traduire, vous ne traduiriez que des traductions.