Page:Lemaître - Jean Racine, 1908.djvu/270

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On y lit des vers comme ceux-ci :

Il n’est point de mortel qui fût assez hardi,
À moins que d’être né téméraire, étourdi,
Qui, voyant les croquis de ta Muse effrénée,
Osât subir le joug de l’affreux hyménée,
Tel tu nous le dépeins ! C’est ton intention
Qui choque la nature et la religion.
Tu fais sur l’Opéra des notes curieuses,
Mais tes réflexions sont trop luxurieuses.

Et tout est de ce style et de cette force. Sa tragédie de Phèdre et Hippolyte est à l’avenant. De la terrible histoire il fait une espèce de petit roman bourgeois. Il dispose les événements de façon à excuser Thésée et à décharger Phèdre sans charger Hippolyte. « Messieurs, ami de tout le monde » ! Phèdre n’est plus que la fiancée de Thésée : ce qui supprime l’inceste, mais aussi le drame. Lorsque Phèdre a découvert qu’Hippolyte aime Aricie, elle la fait arrêter et « garder dans son cabinet » . Sur quoi, Hippolyte vient supplier Phèdre d’épargner Aricie, et se jette à ses genoux. Thésée le surprend dans cette attitude, croit qu’il fait à Phèdre une déclaration d’amour, et charge les dieux de le punir. Tout le crime de Phèdre est de n’avoir pas le courage, à ce moment-là, de dire la vérité ; mais elle conjure Thésée d’épargner son fils, et, prise de remords, elle délivre Aricie et veut la donner à Hippolyte. Hippolyte, pour n’être pas en reste de générosité, quitte Trézène afin d’aller, au loin, oublier sa maîtresse. Et c’est alors qu’un monstre marin effraye ses chevaux et cause sa