Page:Lemaître - Jean Racine, 1908.djvu/296

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D’où lui viennent de tous côtés
Ces enfants qu’en son sein elle n’a pas portés ?
Lève, Jérusalem, lève ta tête altière ;
Regarde tous ces rois de ta gloire étonnés.
Les rois des nations, devant toi prosternés,
De tes pieds baisent la poussière…

Oui, si nous n’étions de si faibles chrétiens « venus trop tard dans un monde trop vieux », Athalie serait vraiment pour nous ce que fut pour les Athéniens l’Orestie ou Œdipe à Colone.

Athalie est unique chez nous. Athalie est une sorte de miracle.

Athalie n’eut aucun succès.

Madame de La Fayette écrit dans ses Mémoires de la cour de France :

Quelquefois les choses les mieux instituées dégénèrent considérablement, et cet endroit (Saint-Cyr) qui, maintenant que nous sommes dévots, est le séjour de la vertu et de la piété, pourra quelque jour, sans percer dans un profond avenir, être celui de la débauche et de l’impiété. Car de songer que trois cents jeunes filles qui y demeurent jusqu’à vingt ans, et qui ont à leur porte une cour remplie de gens éveillés, surtout quand l’autorité du roi n’y sera plus mêlée ; de croire, dis-je, que de jeunes filles et de jeunes hommes soient si près les uns des autres sans sauter les murailles, cela n’est presque pas raisonnable.

Madame de La Fayette exagère et prévoit les malheurs de trop loin. Mais enfin, les jeunes actrices avaient beau s’agenouiller dans les coulisses et réciter le Veni Creator avant d’entrer en