Page:Lemaître - Jean Racine, 1908.djvu/298

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inconnu), sans doute pour les détourner du mariage.

La singulière femme que cette Maintenon !

Il y a eu, au XVIIe siècle, un abbé qui, pour s’être déguisé en sauvage un jour de carnaval et avoir pris dans cet état un bain nocturne et forcé, est finalement devenu cul-de-jatte, et qui, tordu et cloué sur sa chaise, n’a cessé de crier de douleur que pour éclater de rire ; a, peu s’en faut, inventé la poésie burlesque ; a passé pour le plus gai des hommes, et a été plus célèbre à son heure et plus réellement populaire que Corneille ou que Victor Hugo.— Il y a eu, à la même époque, une petite fille née dans une prison, élevée à la Martinique, qui, revenue en France, a gardé les dindons chez une parente méchante et avare, qui a connu la misère et presque la faim, — et qui est devenue la femme du plus grand roi du monde. Et certes, ces deux destinées, prises chacune à part, seraient déjà assez étranges ; mais que dirons-nous de leur rencontre ? Il y a quelque chose de plus extraordinaire que la personne de Scarron et que la fortune de Françoise d’Aubigné : c’est l’union du cul-de-jatte et de la « belle Indienne », future maîtresse de la France.

Et une chose plus amèrement plaisante encore, c’est de voir le grand roi, à quarante-cinq ans, épouser les cinquante ans sonnés d’une dévote dont un bouffon infirme avait cueilli jadis (comme il avait pu) la jeunesse en fleur, et ce monarque