Page:Lemaître - Jean Racine, 1908.djvu/319

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Racine, en abordant le théâtre, trouvait, posée et acceptée, la règle, des trois Unités (règle attribuée à Aristote, lequel n’a jamais parlé que de l’unité d’action).— Il y trouvait aussi, bien établi sur la scène, un certain ton oratoire et même emphatique, reste persistant de nos premières tragédies françaises qui avaient été, je ne sais pourquoi, surtout imitées de Sénèque le tragique.— Il y rencontrait enfin certaines conditions matérielles. Figurez-vous une représentation d’alors : Auguste sur un fauteuil élevé, Cinna et Maxime sur des tabourets, comme à Versailles, tous trois en perruque ; des deux côtés, les jeunes seigneurs sur des bancs ; un éclairage qu’on mouchait dans les entr’actes ; une salle oblongue, un seul rang de loges, le parterre debout.— Une salle de théâtre d’il y a deux cent cinquante ans différait autant par tout son aspect, d’une salle de nos jours, qu’une tragédie de Corneille d’une comédie de Dumas fils si vous voulez.

Cette exiguïté de la scène envahie par les jeunes gens à la mode, on a dit qu’elle suffirait à expliquer presque tout le système dramatique du temps, l’unité de lieu et les autres unités, la sobriété ordinaire de l’action, les confidents, les récits, les longues conversations ; et que les auteurs d’alors auraient conçu leurs drames autrement sur une scène libre et plus vaste. En est-on bien sûr ? Voltaire, en 1766, débarrassera la scène des bancs latéraux qui l’encombraient ; et l’ancien système dramatique dans