Page:Lemaître - Jean Racine, 1908.djvu/326

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peint de l’amour, — même de l’amour-maladie, — c’est sa faculté d’illusion, son aveuglement, sa cruauté, ses souffrances, ses fureurs, enfin son mécanisme psychologique, mais non pas, du moins directement, sa sensualité. Et c’est là-dessus au contraire, c’est sur les troubles des sens qu’ont le plus insisté les comédies amoureuses du XIXe siècle. Elles se sont rejetées sur les femmes pendant la faute ou après la faute, ou sur les femmes subissant leur passé sensuel, ou sur les dames aux camélias de tout rang, ou sur le bagne du « collage », — et aussi sur des thèses juridiques ou sociales touchant l’amour, le mariage, l’adultère, le divorce, etc… Mais les variétés essentielles de l’amour, depuis le plus pur et le plus sain jusqu’au plus criminel et au plus morbide, sont, dans les tragédies de Racine, peintes, on peut le croire, une fois pour toutes.


Poésie.

Et je pourrais vous dire enfin :

Ce fond, ou si vous voulez, cette armature, si solide, si précise, si dure même, est tout enveloppée de poésie.

D’abord par le lointain des personnages et ce que Racine appelle leur « dignité » (préface de Bajazet). Chose curieuse, Racine nous donne de la dignité esthétique une définition très rapprochée de celle que Sully-Prudhomme, dans la Justice, nous a donnée de la dignité morale. Sully nous dit que ce