FRANÇOIS COPPÉE
I
Il est trop vrai qu’on ne lit plus guère les poètes au temps où nous
sommes. Je ne parle pas de Victor Hugo : quoiqu’ils soient devenus sacrés,
on touche encore un peu à ses vers. Tout le monde a entendu réciter le
Revenant ou les Pauvres gens, dans quelque matinée, par une grosse dame
ou un monsieur en habit noir ; il y a des étudiants qui ont parcouru les
Châtiments et ont même feuilleté la Légende des siècles. Musset, lui,
n’est plus guère le « poète de la jeunesse » d’aujourd’hui. Pourtant il lutte
encore contre l’indifférence publique ; mais quelques-uns de ses derniers
lecteurs lui font tort. Quant à Lamartine, qui donc l’aime encore et qui le
connaît ? Peut-être, en province, quelque solitaire, ou quelque couventine
de dix-sept ans qui le cache au fond de son pupitre. Et notez que
Lamartine, c’est plus qu’un poète, c’est la poésie toute