Page:Lemaître - Les Contemporains, sér2, 1897.djvu/222

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dans les bornes d’un rond de cuir, à des Lutrin et à des Seaux enlevés, à des épopées héroï-comiques qu’il aura oubliées dans cinq minutes. Et on le voit, on l’entend : il se conjouit dans sa barbe, il vous appelle « mon ami », il va vous taper sur le ventre. Il est vivant et bien vivant, et je vous assure que c’est là le don suprême.

Sa qualité maîtresse, on le sait, on l’a dit mille fois, c’est le bon sens, qui, à ce degré, ne va pas sans un brin de défiance à l’endroit de la sensibilité et de l’imagination. Là où le bon sens suffit, M. Sarcey triomphe ; là où le bon sens ne suffit peut-être pas, dans certaines questions délicates qu’il est porté à simplifier un peu trop, M. Sarcey fait encore bonne contenance et mérite quand même d’être écouté. Du bon sens, il en a tant montré, si souvent, si régulièrement et si longtemps, qu’il s’en est fait comme une spécialité, que beaucoup lui en reconnaissent le monopole, qu’il a fini par inspirer une confiance sans bornes à quantité de bonnes gens et un mépris sans limites aux détraqués de la jeune littérature. M. Sarcey est comme qui dirait le bonhomme Richard de la presse contemporaine.

La politique l’ennuie : on n’y voit pas assez clair ; les questions y sont trop complexes, presque insolubles. En somme et malgré les grands airs d’assurance qu’on prend, on les tranche au gré de son intérêt et, quand on est honnête, au petit bonheur. La politique est la mère des phrases vides, de la déclamation, des