Page:Lemaître - Les Contemporains, sér3, 1898.djvu/267

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Et je ne puis non plus que répéter ce qu’on a dit souvent, que les femmes, en littérature, n’ont rien « inventé » au grand sens du mot, et que, si elles ont pu quelquefois faire illusion sur ce point, c’est qu’elles ont à un haut degré le don de « réceptivité ». Mais, comme dit l’autre, je connais, à ce compte, bon nombre d’hommes qui sont femmes. Sur cent écrivains de notre sexe à nous, il en est bien quatre-vingt-dix-neuf et demi qui n’ont rien inventé non plus. On pourrait dire aussi que, le nombre des femmes auteurs étant relativement très petit, il y avait beaucoup moins de chances pour qu’il se rencontrât parmi elles un génie qui fût de premier ordre par le don de l’invention. Et s’il est vrai enfin que, même en tenant compte de cela et du reste, nous gardons sur les femmes la supériorité littéraire, il n’en faut pas triompher : il n’y a pas de quoi. D’abord l’invention des idées et de la forme (chose difficile à définir, car où commence l’invention ?) n’est pas tout. La grâce d’une Caylus ou d’une La Fayette est quelque chose d’aussi rare, d’aussi uniques d’aussi beau, d’aussi ineffable et incommunicable que la profondeur de pensée d’un Pascal ou la puissance d’expression d’un Victor Hugo. Puis, que serait la littérature, je vous prie, sans les femmes ? Elles ont joué un rôle considérable dans la vie de tous les grands écrivains, presque sans exception. Il n’est point de beau livre où elles n’aient collaboré. Et ceci n’est point un abus de mots. Car si elles ont joué ce rôle, si elles ont eu cette influence, c’est