Page:Lemaître - Les Contemporains, sér3, 1898.djvu/308

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

était parfaite de l’instrument avec la tâche. Il eut alors ce rare bonheur, et qu’il n’a guère retrouvé depuis, de faire une œuvre bonne et juste tout en obéissant à son démon intérieur, d’avoir raison en ayant de l’esprit, et le genre d’esprit dont il est capable. Il n’était alors que républicain parce qu’il suffisait d’être républicain, sans préciser, pour être de l’extrême opposition. Le 4 Septembre porte au pouvoir ce marquis démocrate, cet homme de trop de nerfs qui, parmi les acclamations de la rue, soulevé sur les flots de la foule, pâlit et se trouve mal comme sur les flots d’une mer. Dès lors, partout où sera l’émeute et l’insurrection, même la plus évidemment injuste et folle, même la plus sanglante, vous retrouverez cet insurgé délicat, qui n’aime pas l’odeur du peuple et à qui le peuple fait peur. Il est des absurdes émeutes d’octobre ; il est de la Commune, jusqu’au bout. On le déporte. Échappé de Nouméa, il reprend son œuvre de destruction avec plus d’acharnement encore, je ne dis pas avec plus de sérieux. Toute puissance établie, quelle qu’elle soit, l’a pour ennemi implacable. Personne n’a jamais traité les hommes qui ont été au pouvoir avec une plus radicale, ni plus violente, ni plus aveugle injustice. Et tout mouvement de la rue, toute grève en province, même tachée de sang, est sûre de l’avoir pour elle, sans examen. Les pires instincts de la foule, je veux dire ceux qui lui font le plus de mal à elle-même, l’envie, la défiance, la haine, l’appétit de jouir à son tour, il n’a jamais manqué