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Page:Lemaître - Les Contemporains, sér4, 1897.djvu/155

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Mais sans doute — et bien que le peuple ne puisse le comprendre entièrement — c’est au poète que s’adressent ces hommages que nul autre écrivain n’a jamais reçus. Et, certes, il n’est point de plus grand poète que Victor Hugo. Mais enfin on peut croire qu’il en est d’aussi grands ; et sa suprématie ne s’impose point à tous les esprits avec la force irrésistible de l’évidence. C’est affaire de sentiment et d’opinion, matière aux disputes et aux jugements incertains des hommes.

Ce qu’il a en propre, c’est une vision des choses matérielles, intense jusqu’à l’hallucination ; c’est, à un degré prodigieux, le don de l’expression, l’invention des images et des symboles ; c’est enfin l’art d’assembler les sons, de conduire les rythmes, de développer et d’enfler la période poétique jusqu’à faire songer aux déploiements harmoniques et presque à l’orchestration des symphonies et des sonates.

Mais Musset a des cris de passion égaux à tout — et une tendresse, une grâce, un esprit, qui sont un perpétuel ravissement. Et quant à Lamartine, rien n’est plus beau que ses beaux vers, par la fluidité et à la fois par la plénitude, par quelque chose d’involontaire et d’inspiré, par le large et libre essor, par l’aisance souveraine et toute divine. Ce poète, qui est