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Page:Lemaître - Les Contemporains, sér4, 1897.djvu/281

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peu à peu en un poème symbolique, grandiose et tout matériel.

L’histoire, la voici en deux mots. Le peintre Claude Lantier, génie novateur et incomplet, rencontre sur son chemin une fille charmante, Christine, qui l’adore et lui est passionnément dévouée. Il l’aime un temps, puis est repris par la peinture, se détache de sa compagne, la fait horriblement souffrir sans le savoir, et, après des années d’efforts douloureux et d’essais avortés, convaincu enfin et désespéré de son impuissance, se pend devant son grand tableau inachevé. — Le milieu où se déroule le drame, c’est le monde des artistes (peintres, sculpteurs, hommes de lettres). — L’époque, c’est la fin du second empire.

La date même de l’action nous fait déjà soupçonner que les théories de Sandoz ne seront pas aussi rigoureusement appliquées ici que se l’imagine M. Zola. C’est bien loin, le second empire. Et M. Zola s’est enlevé le droit d’en sortir. Il n’y a pas d’exemple qu’un écrivain se soit chargé de plus de chaînes et enfermé dans une prison plus étroite que ce superbe romancier. Balzac, du moins, ne s’est jamais interdit les sujets immédiatement contemporains et n’a découvert qu’après coup et sur le tard le plan de la Comédie humaine. Mais M. Zola est captif d’une doctrine, captif d’une époque, captif d’une famille, captif d’un plan. Il semble que la meilleure condition pour écrire des romans vrais, ce soit de