Page:Lemaître - Les Contemporains, sér4, 1897.djvu/290

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Jory, Bongrand. Vous trouverez les deux personnages qui sont dans presque tous les romans de M. Zola : une créature en qui éclate et s’épanouit la bestialité humaine, une « mouquette » : Mathilde, l’herboriste ; et une créature qui représente la souffrance imméritée : le petit Jacques. Vous trouverez même des pages apaisées et presque gracieuses : Christine recueillie, par une nuit d’orage, dans l’atelier de Claude, ou l’idylle parisienne et bourgeoise du ménage de Sandoz. Vous trouverez aussi deux ou trois scènes qui ne sont peut-être que mélancoliques : celle où Dubuche, l’homme qui a fait un riche mariage, passe sa journée, dans le morne château où il est méprisé des valets, à envelopper de couvertures et à suspendre à un petit trapèze ses deux petits enfants rachitiques, et le dîner où le brave Sandoz a le sentiment amer de la dispersion et de la mort des amitiés de jeunesse…

Mais plutôt vous trouverez, presque à chaque page, une tristesse affreuse, une violence de vision hyperbolique qui accable et fait mal. Nul n’a jamais vu plus tragiquement tout l’extérieur du drame humain. Il y a du Michel-Ange dans M. Zola. Ses figures font penser à la fresque du Jugement dernier. J’attends avec impatience son prochain cauchemar. S’il ne sort de Médan, il finira par des livres d’un naturalisme apocalyptique, qui pourront, d’ailleurs, être fort beaux.