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Page:Lemaître - Les Contemporains, sér6, 26e mille.djvu/17

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pour en jouir, ce n’est pas le lire pour oublier le reste, mais c’est laisser ce reste s’évoquer librement en nous, au hasard charmant de la mémoire ; ce n’est pas couper une œuvre de ses rapports avec le demeurant de la production humaine, mais c’est accueillir avec bienveillance tous ces rapports, n’en point choisir et presser un aux dépens des autres, respecter le charme propre du livre que l’on tient et lui permettre d’agir en nous… Et comme, au bout du compte, ce qui constitue ce charme, ce sont toujours des réminiscences de choses senties et que nous reconnaissons ; comme notre sensibilité est un grand mystère, que nous ne sommes sensibles que parce que nous sommes au milieu du temps et de l’espace, et que l’origine de chacune de nos impressions se perd dans l’infini des causes et dans le plus impénétrable passé, on peut dire que l’univers nous est aussi présent dans nos naïves lectures qu’il l’est au critique-juge dans ses défiantes enquêtes.

                                       (12 septembre 1892.)
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… Il est, pour le moins, deux façons d’entendre la critique des oeuvres littéraires.