Page:Lemaître - Les Contemporains, sér6, 26e mille.djvu/184

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mer cela, si l’on veut, « la perfection héroïque » (le mot est de M. Émile Ollivier) ; mais Laurence, a-t-il donc le droit de la sacrifier aussi ? — « Ô poète imprudent ! s’écrie le pasteur Vinet, quel fantôme vous élevez à la place du catholicisme ? Jocelyn devient prêtre afin de pouvoir donner l’absolution… Personne n’oserait dire qu’un homme pieux perd son titre à l’héritage céleste parce que, contre sa volonté et son vœu, il serait mort loin des consolations de l’Église… Le fanatisme est beau en poésie, mais le poète ne doit pas laisser lieu de penser qu’il épouse les emportements du zèle aveugle et amer. C’est, à mes yeux, le tort de M. de Lamartine en cet endroit. »

« Mais laissons de côté l’argument religieux, voyons les choses humainement. Si le sacrifice de Jocelyn en faveur de sa sœur est d’une beauté parfaite, le second, son obéissance aveugle à l’évêque, est bien discutable. Qu’a donc fait la malheureuse Laurence pour être immolée aussi, avec Jocelyn et par lui ? C’est à cela pourtant que tient tout le poème ; c’est le postulat nécessaire afin que Jocelyn, devenu prêtre, ne puisse plus l’épouser. Eh bien ! cela n’est pas plus vraisemblable qu’orthodoxe. Et ce n’est pas la même sorte d’invraisemblance que celle du long tête-à-tête angélique de toute une année dans la solitude ; invraisemblance résultant de l’idéalité seule : ici c’est une accumulation de circonstances inadmissibles, sans aucun bénéfice d’idéal. Jocelyn